Laurent Demeure analyse le marché immobilier de luxe en 2023

Publié le 13 janvier 2023 - Coldwell Banker

Laurent Demeure analyse le marché immobilier de luxe en 2023

Nouvelle interview sur l'état du marché en France réalisé à Laurent Demeure, président et CEO de Coldwell Banker, premier réseau immobilier de prestige à niveau mondial, qui s'est implanté en 2011 en France. Ceci est un extrait de notre nouvelle étude sur le marché immobilier de luxe en 2023 qui est à découvrir ici

Pourquoi cette étude réalisée avec PriceHubble ?

Nous avons amorcé depuis le début de l’année un virage économique qui forcément se répercute sur l’immobilier. Après une année 2021 hors-norme, nous sommes en train de revenir à une situation que je qualifierais de « normale ». Pour établir un état des lieux précis sur le marché du luxe, les chiffres de PriceHubble viennent s’ajouter à l’expertise de nos consultants sur le terrain.

Nous avons sélectionné plus d’une vingtaine de villes, territoires traditionnels du luxe et nouveaux territoires, dits « territoires émergents », afin d’analyser au mieux les mouvements de 2022.

Comment définissez-vous un bien de luxe ?

Notre étude est basée sur deux critères :

- les biens dont le prix est supérieur à 1 million d’euros.

- les biens dont le prix relève des 10% des biens les plus chers dans le secteur concerné.

Contexte morose, taux en hausse, inflation... devons-nous redouter une crise immobilière ?

Nous sommes entrés en 2022 dans un nouveau cycle, celui du retour à l’équilibre. Il est vrai qu’en moyenne le pouvoir d’achat immobilier des Français s’est ralenti, mais le segment du luxe reste épargné.

Rappelons que pour notre clientèle de nombreuses transactions se font sans emprunt, la hausse des taux d’intérêt n’est pas un sujet.

Malgré la hausse des taux d’intérêt et l’inflation croissante, le secteur de l’immobilier de luxe reste florissant, comment l’expliquer ?

Rappelons que 2 ou 3%, c’est loin d’être anormal ! Nous sortons d’une période où l’argent ne valait presque rien, il a désormais un coût.

Mesurons notre chance : en France, plus de 90% des propriétaires ont contracté des taux fixes, ce qui n’est pas le cas de beaucoup de nos voisins européens qui ont contracté des crédits à taux variable.

Nos deux études nous montrent que l’envie est toujours là. C’est presque un réflexe pavlovien, quand il y a quelques turbulences au plan économique, la pierre reste la seule valeur refuge.

Et la France, pour la clientèle internationale, c’est le Graal. Aucune capitale européenne ne fait rêver comme Paris.

L’immobilier de luxe reste une valeur refuge, pourquoi ?

Acheter en France, à Paris surtout, reste un acte patrimonial fort et rassurant. Regardez par exemple les répercussions de la série Emily in Paris; depuis la sortie de la saison 3, Britanniques et Américains rêvent de posséder un petit bout de la capitale.

Selon le premier site d’estimation immobilière britannique, les recherches en ligne pour déménager à Paris ont bondi de 1.416 % au lendemain de la sortie de cette nouvelle saison.

Quelle est cette clientèle qui investit dans les biens de prestige ?

Avec la fin du confinement, les clients étrangers font leur grand retour en France, les Américains notamment qui profitent de la parité euro/dollar. Ils profitent des taux en France qui restent bien inférieurs aux leurs.

La clientèle nordique est aussi de plus en plus présente.

Sur la côte d’Azur, nous avons des clients qui paient cash après un coup de cœur, pour des villas à plusieurs millions d’euros.

On a parlé pendant des années du trio Paris-Londres-New York. Aujourd’hui le Brexit a-t-il changé la donne ?

Oui, c’est désormais le duo New-York/Paris qui ressort.

Selon les nouvelles prévisions des agents immobiliers Outre-Manche, les prix du centre de Londres vont chuter de 12,5 % l’année prochaine, puis de 1 % en 2024, avant une reprise en 2025.

Autre source : l’Office for Budget Responsibility (OBR), agence de données gouvernementales s’attend à une baisse des prix de l’immobilier pour ces deux prochaines années, -9 % d’ici à l’automne 2024.

Actuellement, les taux se situent juste au-dessus de 6 %, le niveau le plus élevé depuis la crise financière.

La notion de luxe a-t-elle changé ?

Après le confinement, la clientèle a revu ses priorités : voyager n’étant plus possible, nous avons assisté à une migration vers les villes petites ou moyennes, pour acquérir un haras ou un château. Tous les superflus étaient permis, les clients étaient en quelque sorte dopés aux taux négatifs…

Pour reprendre les mots de notre étude américaine, « bigger was better ». Cette tendance du « toujours plus » se rééquilibre. Nous pouvons à nouveau voyager, s’évader, donc cette volonté de se rapprocher de la nature  est moins forte.

Y a-t-il de nouveaux territoires du luxe ?

Oui, même si les territoires traditionnels restent une référence.

À Paris par exemple, les beaux quartiers ont toujours la cote, (Triangle d’or, quartier germanopratin, école militaire...) mais les familles qui recherchent des quartiers « village », à proximité de parcs, n’hésitent plus à s’installer dans les quartiers de l’est de la capitale.

C’est le cas du 11 ème arrondissement, très vivant, très commerçant, ou encore des quartiers qui entourent les Buttes-Chaumont, dans le 19 ème arrondissement.

Traverser Paris où s’y déplacer est de plus en plus difficile. Il y a un désir d’encrage, d’appartenance à une vie de village.

Désormais, le marché haut de gamme s’étend aux 20 arrondissements parisiens.

L’immobilier de luxe se délocalise, à Paris et en région.

Le phénomène se vérifie sur l’Atlantique Riviera; Biarritz, Hossegor, le bassin d’Arcachon sont devenus des marchés saturés. Notre clientèle s’est déplacée vers Andernos-les-Bains par exemple.

Le marché de l’immobilier de luxe gagne du terrain en Loire-Atlantique; Nantes avec son patrimoine historique et sa qualité de vie, attire les Parisiens.

La Baule, la Rochelle ou encore Saintes confirment leur positionnement haut de gamme.

Qu’en est-il de l’engouement pour les villes moyennes et petites ?

Il est beaucoup plus modéré ! La période covid en 2020 et 2021 a provoqué une ruée des citadins vers ces villes souvent situées en milieu rural. Les habitants des grands centres urbains et des métropoles s’étaient jetés sur des maisons de campagne aux prix très accessibles pour se mettre au vert.

Cette tendance est derrière nous, avec un retour aux fondamentaux : la localisation (qui est la première des exigences), la qualité des biens, ses prestations (parquet, moulures, cheminée, vue dégagée, balcon ou terrasse).

Quel est le positionnement de la France en matière d’immobilier par rapport au reste du monde ?

En Espagne, nous assistons à un retour de la clientèle américaine, très intéressée par le luxe catalan. Avec la situation économique mondiale actuelle, la force du dollar par rapport à l’euro signifie que l’acheteur nord-américain est dans une position avantageuse pour acquérir un logement de luxe en Espagne et, plus précisément, à Barcelone. Le budget moyen d’un acquéreur américain dans la péninsule ibérique est de 1,4 million d’euros.

L’Italie est touchée comme l’ensemble de ses voisins par le contexte international  et l’inflation, mais Milan, Rome, Bologne tirent leur épingle du jeu avec un marché quasi-imperturbable…

Après un retour à l’équilibre en 2022, les prévisions pour 2023 indiquent une baisse des transactions d’environ 8%.

Monaco échappe totalement au ralentissement général. La plupart des clients achètent cash et n’ont pas recours à un prêt. Le Rocher est l’un des endroits au monde où le prix moyen du m² est le plus cher au monde, environ 50 000 euros.

C’est au cœur du quartier du Jardin Exotique que les records sont battus :  les biens culminent à 70 000 ou 85 000 euros du mètre carré et à Monte-Carlo.

Les Suisses sont apparemment nombreux à vouloir vendre leur bien immobilier. Au niveau national, les offres de biens immobiliers ont bondi de 73% entre octobre 2021 et fin juin 2022 au nouveau de l’immobilier résidentiel.

Doit-on craindre une crise immobilière générale qui pourrait ralentir la croissance mondiale ?

Le marché s’est déjà retourné en Chine, notamment en raison de la situation sanitaire, et les prix ont commencé à baisser aux Etats-Unis. Certains économistes craignent la chute des investissements dans la pierre et un resserrement des conditions de crédit.

Les taux hypothécaires sont proches de 7% aux Etats-Unis, où ils ont plus que doublé en moins d’un an. Ils ont également fortement augmenté en Grande-Bretagne, à 4% soit un niveau proche de celui de 2003, selon Oxford Economics, une société de conseil anglais. Le coût des hypothèques est l’un des éléments qui pourraient provoquer un « choc de confiance » sur l’immobilier principal.

L’immobilier de luxe joue plus que jamais son rôle de refuge financier. Notre clientèle est en quête d’exclusivité.

Le nombre de propriétés en vente dans les spots très prisés est souvent bien inférieur aux niveaux d’avant pandémie.

C’est pourquoi la forte attractivité à l’international, un marché intérieur dynamique et la  rareté des biens de prestige en France joue un rôle déterminant qui va à contre-courant de l’immobilier classique.

Quant aux prix, ils vont se stabiliser ou augmenter très légèrement sur les territoires ultra recherchés (Cap Ferret, Mougins, Megève...).

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